Rimini, Italie


IOVADOVIA

(antigone) contest #3





Le mot IOVADOVIA est écrit d'un seul bloc, sans espaces. De la confusion optique qui en résulte, le sens n'émerge pas à première vue, puis, de quelque façon qu'on le perçoive, il s'impose à la lecture, inéluctable.


Dans ce troisième contest, Antigone évoque Tirésias, privé de la vue pour "avoir trop vu"... Tous deux sont placés alors précisément dans ce point limite que les Grecs appellent ate, un espace-temps infime et éphémère entre la vie et la mort, qu'on ne peut franchir que pour un bref instant dans le cours de son existence.


Nous les imaginons sur le bord d'un lac noir et sans fond, dans un abri de fortune, comme ces campements surgis de nulle part aux abords des métropoles, construits par ceux qui ont tout perdu ou par ceux qui ont décidé de s'en aller.

Un "lieu obscur" partagé avec les spectateurs et éclairé par leur regard – cette fois encore, les spectateurs sont installés dans l'espace scénique, témoins de cette confrontation qui prend une forme circulaire et magique.


Ce contest improbable se décline sur les tonalités de l'abandon définitif, non pas fuite, mais voyage vers la mort, camera oscura pour Antigone, ou inconnu qui se dessine pour un Tirésias-femme, qui s'exprime en anglais d'une voix rauque. Tirésias vient de quitter Créon, l'ayant auparavant accusé d'avoir inversé la cosmologie de la vie et de la mort. Est vivant en effet qui peut voir le soleil et être atteint de ses rayons: or Créon a exercé la plus abjecte violence contre cette équation, en faisant jeter vive Antigone dans l'obscurité et en ordonnant que le cadavre de Polynice soit abandonné, pour qu’il se décompose à la lumière du soleil. Ce renversement marque le début des désastres de notre monde, où massacres et guerres ont laissé un nombre indescriptible de morts sans sépulture dans les rues, et des vivants qui attendent dans l'obscurité des souterrains, faisant venir à la mémoire les dessins des Refuges d'Henry Moore...


"Et la lumière sacrée du soleil, je ne pourrai plus la voir?" s'interroge Antigone, conduite au tombeau. Mais est-ce bien de cela qu'il s'agit? Antigone s'apprête à rejoindre l'obscurité de la grotte et Tirésias, lui, vit déjà dans l'obscurité d'une cécité qui l'éblouit. Les deux regards se rencontrent. Tous deux ont vu l'ombre des mêmes terrible things se dessiner. Ils l'ont prédit. Mais peut-être seuls les animaux les écoutaient-ils.


Lien vidéo : http://www.e-theatre.it/play.php?vid=510

 
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